Latest News

La Retro de Mars par Oursique

 

Faisons le point sur ce qui est peut-être votre loisir ou même art préféré :

  • une série d’avancées technologiques a permis l’émergence de toute une industrie, de nouveaux métiers ;
  • il a fallu attendre longtemps pour avoir le son, la couleur, et qu’on en profite chez soi ;
  • faute de salles permanentes, on devait attendre le passage de foires pour en profiter ;
  • les salles avaient mauvaise réputation, les parents n’aimaient laisser leurs enfants y aller ;
  • les premières œuvres étaient souvent des clones d’une œuvre qui a eu un succès populaire ;
  • on s’attendait même à ce que le phénomène passe de mode et que les gens l’abandonnent ;
  • il a aussi fallu longtemps pour passer du format court à de longues et prenantes histoires ;
  • et il a fallu ce temps pour que ce nouveau média commence à être considéré comme un nouvel art.

 

Si vous pensiez à l’histoire du jeu vidéo, et à votre jeunesse dans les salles d’arcades, puisque nous sommes sur la Caz‘ rétro, j’ai réussi mon accroche.

Je parlais en fait de l’histoire du cinéma.

Le cinéma du début du 20e siècle doit encore faire ses preuves. C’est un phénomène de foire où l’on s’émerveille encore du simple fait de voir une image bouger. Et l’on regarde un énième film de policiers qui courent après des méchants. On reste encore proche du modèle du théâtre.

Il faudra attendre les années 10 pour que les premières salles permanentes ouvrent à Paris, et que des gens comme Chaplin — pour ne citer que lui qui en avait marre des recettes éculées — décident d’exploiter les possibilités uniques du support pour raconter des histoires comme il n’était pas possible de le faire avant. Et que s’enrichissent soudainement les codes cinématographiques que l’on connaît aujourd’hui.

L’expression « septième art » naît dans les années 10 mais son auteur bataille encore dans les années 20 pour la faire admettre. Alors que Chaplin a déjà réalisé plusieurs des chef-d’œuvres qu’on lui connaît.

Là où je veux en venir, au-delà du parallèle que j’ai établi avec l’histoire du jeu vidéo, c’est que nous, retrogamers, sommes au jeu vidéo ce que les cinéphiles sont au cinéma.

Je m’amuse moins de constater comment un cinéphile est reconnu pour sa culture par la société, alors qu’un retrogamer aura droit à des termes condescendants comme « nostalgique », « adolescent attardé », voire « geek » comme dans « toi t’es qu’un geek ».

Il y a du chemin… mais le cinéma a un siècle. Le jeu vidéo commercial n’en a même pas atteint la moitié.

 

 

Tenez, faisons justement le point sur le cinéma séculaire :

 

  • cette industrie pèse plusieurs milliards, rien qu’aux États-Unis par exemple ;
  • des créateurs (metteurs en scène, scénaristes, compositeurs) sont assez célèbres pour que le grand public puisse en citer ;
  • les métiers et les codes du cinéma sont enseignés dans des écoles spécialisées, pas dans les écoles de théâtre;
  • il ne viendrait à personne l’idée de contester le qualificatif d’art ;
  • personne ne perd non plus de vue que c’est un produit culturel de consommation, les deux sont possibles.

 

Le jeu vidéo commence à valider tous ces points. Pour le poids financier, c’est vite vu, c’est la première industrie culturelle, devant le cinéma, justement. Il est assez probable que votre entourage qui ne partage pas votre passion ait quand même entendu le nom de Shigeru Miyamoto. Mais pas de quoi avoir une série sur les game designers à Questions pour un champion.

Et le jeu vidéo continue de créer ses métiers et ses codes, et de les enseigner dans des écoles qui continuent de s’ouvrir.

Pas besoin de démontrer la nature de produit culturel. Reste donc la question de l’art qui fait débat. Il a fallu du temps au cinéma pour acquérir ses lettres de noblesse, il en sera de même pour le jeu vidéo. Non, ce n’est pas Flappy Bird qui élèvera le jeu vidéo au rang d’art. Mais les teen movies n’invalident pas le statut artistique du cinéma dans son ensemble. Ça n’a pas non plus empêché de continuer à créer des films de policiers qui poursuivent des méchants.

Attention, je ne dis pas que le jeu vidéo s’inspire du cinéma parce qu’il a grandi de la même façon. C’est tout simplement que les premières générations de créateurs étaient bercées de cinéma dès l’enfance. Et les générations actuelles ont grandi avec un jeu vidéo déjà avancé. Peut-on imaginer ce qu’ils seront capables de créer une fois devenus créateurs ? Chaplin avait-il imaginé le cinéma d’aujourd’hui ?

Je ne me sens personnellement pas capable d’imaginer à quoi ressemblera le jeu vidéo quand il soufflera ses cent bougies. Mais je ne doute pas qu’il existera encore.

OURSIQUE

 

 

12 comments on “La Retro de Mars par Oursique

  1. Clockwork dit :

    Beaucoup apprécié le parallèle Bravo oursique !

  2. in_amber_clad dit :

    Superbe introduction !
    Je suis tombé dans le panneau 😉

    Ceci dit, je pense que le qualificatif d’art pour le jeu vidéo mettra plus de temps à faire son chemin que pour le cinéma.
    Notamment car, hormis depuis une décennie, le jeu vidéo s’adressait principalement à une population jeune. De ce fait, les plus âgés et les « bienpensants » n’ont été que peu impliqués dans le début du jeu vidéo et n’ont donc pas été moteurs de son expansion intellectuel dans la culture sociétale.

    A mon sens, le JV prendra toute sa place comme art dans 20 ans environ, quand la génération qui a découvert les Mario, Sonic et autres feron partie de la tranche d’âge qui est « écoutée ». A savoir 40 à 60 ans, l’âge de raison et de la sagesse.

    Mécaniquement aussi, les non-séduits de la première heure seront également moins nombreux et nous nous retrouverons donc avec une majorité de personnes ayant grandi avec. La force collective des souvenirs vidéoludiques achèvera ainsi la mue du JV en tant qu’art.

  3. Oursique dit :

    Maintenant qu’il est publié je vois tous les défauts. 😀

    Vous pouvez remettre le second point sur le cinéma d’aujourd’hui sous forme de liste, en inversant le point-virgule et le point avec le dernier item, et mettre Questions pour un champion en italique ?

    Il y aussi le « des gens comme Chaplin » qui me gêne, le mot est trop générique. Mais je ne trouve pas mieux que de répéter « créateurs », « pionniers » me paraît exagéré.

  4. Oursique dit :

    Merci pour les corrections !

Laisser un commentaire

Scroll to top